U CATENACCIU

 

Le Catenacciu trouve son origine en Espagne médiévale. La procession retrace le calvaire de Jésus Christ portant sa croix.

Au XIII Siècle ce serait les moines Franciscains qui auraient introduit « les chemins de croix » dans la culture Corse. La foi catholique s’est affirmée sur l’île au VIII Siècle en guise d’opposition à la foi musulmane de l’occupant Maure. C’est en 1735 que le Dio vi salve regina devient l’hymne Corse, plaçant l’île sous la protection de la vierge.

Les fêtes religieuses sont encore empreintes de traditions, ainsi la semaine sainte est sans nul doute le moment de communion religieuse et populaire du calendrier Corse. Les processions du Vendredi saint, qui différent du Nord au Sud de l’île, en sont les plus saisissantes.

 

 

Le Catenacciu (de catena, chaîne) est une cérémonie qui se déroule en plusieurs points de l'lIe, le vendredi saint. Le plus célèbre est celui de Sartè (Sartène). Il s'agit d'une mise en scène du chemin de croix que le Christ fit pendant sa Passion; on la retrouve dans plusieurs pays méditerranéens, notamment en Espagne où elle est parfois très spectaculaire.

Le Catenacciu est littéralement « le porteur de chaînes ». Il représente le Christ. Habillé et cagoulé de rouge, son identité est strictement secrète, car celui qui a choisi de porter la lourde croix et de traîner les chaînes sur le chemin de la Passion est quelqu'un qui expie une faute grave ou qui a le désir désire réaliser un vœu. Il circule ainsi, pieds nus, dans les rues de la ville, il gravit la colline jusqu'au sanctuaire rural où il s'arrête quelques instants, puis revient jusqu'à l'église, suivi par la foule. Il est entouré de neuf compagnons habillés et cagoulés de noir, parmi lesquels on reconnaît Simon de Cyrène qui, de temps à autre, l'aide à porter son fardeau...

 

Le Catenacciu achève son chemin de croix au pied de l’autel. Là, il s'affale sur sa croix dont le sommet est appuyé contre la table de cet autel. Il tourne le dos au public. Les fidèles qui ont suivi la procession défilent maintenant dans le chœur. Ils s'approchent de lui, le touchent, se signent et s'en vont. Dès lors, la cérémonie est terminée pour le public. Mais le Catenacciu est emmené en secret vers la cellule où, pendant trois jours, il est resté enfermé, dans le silence et le jeûne. Il quittera la ville aussi mystérieusement qu'il y est arrivé.

 

La personne qui désire faire le Catenacciu est quelqu’un qui à un moment de sa vie désire souffrir d’une manière personnelle, et par extension d’une manière communautaire. L'inscription se fait auprès de l'archiprêtre et l'attente peut durer de nombreuses années tant les candidats pè u Catenacciu sont nombreux (la « liste d’attente » pour incarner le pénitent rouge à Sartène s’étendrait à 20 ans). Seul le curé connaît l'identité des pénitents dont l'anonymat est préservé par une cagoule.

 

 

Le Catenacciu à Sartène :

Trois jours avant l'épreuve, u Catenacciu a été conduit dans le plus grand secret, vers une cellule. Il va rester enfermé, seul. Il priera et se préparera à l'épreuve. Jusqu'en 1965, le lit au sommier métallique était très bas. Aujourd'hui, c'est "un lit normal". Les murs de la chambre sont ornés d'images pieuses. Il y a un lavabo et une petite table sur laquelle est posé un crucifix. Quelques livres : la biblia sacra, la bible à la lumière de l'archéologie, la passion du christ selon la chirurgie du docteur barbet. Naguère, on y trouvait l'explication des épîtres selon saint Paul, l'édition de 1646 des sentenze di st antonia di pavova et la reggia oratoria éditée en 1757…

La porte de la cellule ne s'ouvre que pour laisser pénétrer le frère franciscain avec son frugal repas, ou le prédicateur, également franciscain qui le prépare par la priére et le recueillement, afin qu'il puisse "descendre au fond de lui même" et "se pénétrer du calme divin"

Le vendredi soir, à 20h 30, le Catenacciu et le pénitent blanc sont conduits jusqu'à l’édifice religieux qui sera le point de départ de la précession.

Silencieux, habillé et ganté de rouge, le visage caché par une cagoule percée de 2 trous, u Catenacciu s'agenouille au pied de l'autel, on lui met les lourdes chaînes au pied. Une croix épaisse et lourde est posée sur l'autel : c'est sa croix.

 

 

A 21 heures, la cérémonie a commencé ! Les pénitents sortent de l'église, pieds nus et visages couverts, suivis de quatre pénitents noirs portant le dais et de quatre autres portant le christ nu dans un linceul. (Les pénitents noirs symbolisent les juifs).

Tous les regards sont fixés sur l'homme rouge.

Derrière eux, et sur leur passage, la foule murmurera des prières et chantera:

"Perdono, mio Dio
Mio dio perdono
Perdono mio Dio
Perdono è Pietà ..."

Sur un parcours de 1,8 km, dont un tiers dans les ruelles encore pavées de la vieille ville, u Catenacciu tombera trois fois.

De retour, place Porta après la bénédiction, il regagnera le couvent, d'où il s'éclipsera, meurtri mais heureux, l'âme sereine, en paix avec sa conscience.

 

page 2